où sont les parfums sucrés de l'enfance ? Où sont-il passés ?
« Marlowe regarde celui-là ! » On entend des chuchotements. Deux petites filles sont là, allongées dans la cabane qu'elles ont fabriquée. Couvertures, couettes, oreillers, une grotte loin des regards des autres. Un petit coin sympa. Leur coin. Deux sœurs, l'une s'appelle Marlowe, l'autre Dakota. « Il est trop beau ! » s'émerveille la plus jeune des sœurs ; Marlowe. Si on s'approchait, on pouvait voir, qu'elles remplissaient toutes les deux une sorte de carnet. Ou plutôt un album où elles y collaient des étiquettes de bouteille comme si c'était une collection. Pour être franche. C'en était une. Elles étaient petites. Et puis Marlowe avait la particularité d'adorer faire des albums de tout et n'importe quoi. Il y en avait pour les photos du ciel, un autre pour les photos de la fenêtre d'en face puis encore un pour tous les papiers de bonbons… Elle vivait dans un autre monde. Le sien. Aider de sa sœur, bien souvent, elles se réfugiaient dans cette cabane créée à la main ; c'était le seul endroit où Marlowe acceptait de partager son monde. « Oh et puis celui-là avec les princesses » montre sa sœur. Marlowe le prend délicatement. Comme si c'était un objet précieux. Alors qu'entre nous, ce n'était qu'un bout de papier sans valeur. Mais avec cette petite brune, tout objet avait une importance. « Wow, c'est une édition limitée. Faut faire attention ! » Elle regarde l'étiquette des étoiles plein les yeux. Pour Dakota c'était un réel plaisir de voir sa sœur aussi émerveillée devant c'est petite chose. « Les filles il est l'heure de dormir. » « Oui maman, on y va ! » Interruption de leur mère. Il se faisait tard. Les deux fillettes décidèrent de ranger les étiquettes dans leurs boîtes respectives, de fermer l'album et de se coucher dans cette petite grotte toute confortable. « Bonne nuit mes chéries. » Et d'un geste doux, elle appuie sur l'interrupteur. La lumière s'éteint, plongeant la pièce dans le noir.

same old empty feeling in your heart
« Alors vas-tu rester chez les rubis ? » Les lumières pâles d'un dîner guindé, de ceux où on ne voudrait vraiment pas s'y rendre lorsqu'on a dix-sept ans. Marlowe divaguait, au loin son regard perçait les faibles couleurs, et les plats flamboyants. « Marlowe ? » Un éclair de réalité, elle revint parmi les mortels bordés d'ennui, ces vieilles dames aux allures faibles mais froides. « Je me doute bien que ce n'est pas quelque chose que l'on sait comme cela...sur le bout des doigts, mais... » La situation la prenait à la gorge, l'étouffait terriblement. Fuir ! Rien d'autre ne lui disait véritablement, si ce n'était quitter cet arrangé qu'on lui avait collé aux basques. Elle sourit. Comme à son habitude. « Je pensais peut-être rejoindre les Saphirs, ils possèdent un bibliothèque remplie de livres, j'aimerais vraiment pourvoir y travailler. » Cette révélation ne réchauffa guère l'atmosphère, si bien que même ce jeune homme sembla abandonner. « Ah je ne crois pas que cela soit une bonne initiative pour la réputation de notre famille. » Dans ce reproche, celui de son père. Et ce regard qu'elle découvrait aux minces lueurs, elle le détesta dans l'instant. « Tout n'est question de réputation avec toi ! Tu l'as bien laisser choisir Dakota ! » La voix aux inflexions de sa soeur, à qui elle vouait une admiration modérée. Plus proches d'elle que des autres, jamais une personne de la famille ne l'avait autant compris qu'elle. Elle avait tant de grandeur d'esprit. « À part ça, c'est tout ce qui te tente ? » Soupire d'une élégance modérée, ce qu'il fallait de contenance pour être braise et brouillard. « Même s'il est inélégant de parler de soi, je compte bien réaliser ce rêve ambitieux et la littérature est un sujet que j'idolâtre. » Extrême lassitude au coeur de Marlowe, perdant tout intérêt à la conversation, si bien que le vin ne saurait entretenir son esprit.  « Bien tant que ton opinion ne change pas et que tu ne fais pas honte à ta famille. » Elle renonça à la moindre argumentation, et se contenta d'un sourire contrit et de toute la politesse qu'on lui avait inculquée.

and you let her go
La place était pleine. Elle sentait tous ses regards sur elle. Pourtant elle n'était pas seule, il y en avait d'autre. Mais c'était plus fort qu'elle, elle sentait son palpitant s'accélérait. Elle avait simplement peur du regard des autre sur la décision qu'elle comptait prendre. L'attente en était encore plus pesante. Sa respiration haletait, s'arrêta net lorsqu'elle entendit l'appel de son prénom. C'était comme un bourdonnement dans ses oreilles. Constant. Elle s'avança donc vers la fontaine. Le fameux objet de tant de conflits familiaux. Elle jeta sa pierre d'origine, de couleur rouge. Puis attendit. Elle regardait autour d'elle, la respiration alerte. Elle aurait pu faire comme sa sœur, prendre une pierre rouge. Mais elle n'était pas comme eux. Préférant la littérature, le savoir plutôt que la force physique. La jeune fille blonde se baissa vers la fontaine. Et d'une main tremblante attrapa une pierre. Elle la tenait fermement de sorte qu'on ne puisse pas voir de quelle couleur elle était. Puis dans un geste élégant et lent, elle se dirigea vers La fille de la Lune. Une révérence. Tête baissée, mains tendues, Pierre à plat. Désormais elle attendait. Son souffle se faisait plus lent, essayant de calmer son mal l'aise. Se trouver devant Narcissa Peresor était vraiment quelque chose d'incroyable. Une sensation de bien-être mais également d'infériorité. Puis soudain, dans le silence accablant de l'assemblée, la chose qu'elle attendait patiemment arriva : « que puisse la Pierre de Lune te protéger. » Un sourire esquissa ses lèvres. Elle l'avait fait. Fière d'elle elle jeta un regard vers sa mère et sa sœur et à son plus grand bonheur, elle les vit sourire. Elles ne lui en voulaient donc pas malgré ton choix de partir. Tout en marchant vers le scientifique, elle ignora le regard glacial de son père. La voilà désormais Saphir.


don't worry be happy
« Marlowe pourrais-tu aller t'occuper de ranger la littérature française, j'ai oublié de la faire hier soir. » La jeune femme désormais âgée de vingt-quatre ans passe son quotidien à la bibliothèque. Un passe-temps que beaucoup diront ennuyeux au sein de son ancienne obédience mais qui la réjouissait. Elle était rêveuse et se perdait parfois dans la lecture d'ouvrages qu'elle devait ranger. « Je le fais tout de suite. » Direction les étagères de la littérature française. Elle vit un chariot encore plein et quelques livres par terre ou rangée n'importe comment. Jamais elle n'avait poussé de soupir en voyant ce genre de choses. Elle aimait ça. Prendre un livre délicatement, le positionner à sa place, le touchait et pourquoi pas le sentir. Elle prit donc un livre comme il se devait, comme si c'était une pierre précieuse. Rimbaud. Elle feuilleta quelques secondes l'ouvrage pour remarquer que c'était un poète. Malheureusement son risible Français ne lui permettait pas la compréhension de ces poèmes. Soudain, la tête de ta collègue apparut. « Marlowe, y a le garçon que tu aimes qui est là. »Chuchota-t-elle. La jeune femme aux cheveux blonds quitta donc son petit couloir et se dirigea vers l'entrée du bâtiment. Il était là. Eliyah. Ce beau jeune homme au charme incontesté. Elle aimait beaucoup sa compagnie, oui, il lui faisait voir le monde sous un autre angle. Il était tellement intrigant et chaque fois qu'il parlait, elle était comme une gamine, les yeux pleins d'étoiles à écouter cet homme plein d'éloquence. Lorsqu'elle arriva devant lui, elle sourit. Son palpitant venait juste de faire un bond hors de sa poitrine....